Description de l'évènement

Jeudi 29 septembre 2022 à 19h

L’homme qui ment

Alain Robbe-Grillet

France/Tchécoslovaquie, 1967, 1h37

Avec : Jean-Louis Trintignant, Sylvie Bréal, Dominique Prado…

« Je vais vous raconter mon histoire » dit Boris (ou est-ce qu’il s’appelle Jean?) à plusieurs reprises dans ce film. Mais son histoire est régulièrement menacée par les contradictions venant de lui-même, des autres, ou par ce que le film montre…

Après Trans-Europ-Express, L’homme qui ment est le deuxième film d’Alain Robbe-Grillet avec Jean-Louis Trintignant (et il tournera encore deux autres avec le même réalisateur). Ce film est un échec remarquable : échec commercial, mais remarquable pour plusieurs raisons. Trintignant est récompensé avec l’Ours d’argent de Berlin pour son jeu d’acteur dans ce film. Avec un air d’étonnement constant, il joue le rôle d’un homme, fuyant la guerre, qui invente le récit du film – qui invente son existence dans sa propre histoire. Mais, peut-on le croire ?

Le titre du film est un indice. Il joue avec les mots, il joue avec le récit – ou, le narrateur joue avec lui… Robbe-Grillet transpose quelques caractéristiques du Nouveau Roman, c’est-à-dire son idée de Nouveau Roman, au cinéma. Ce qu’il avait mis en œuvre dans Les gommes ou Le voyeur, il le réussit au cinéma : briser les codes et conventions d’un cinéma – et d’une narration – classique. Comparé à Robbe-Grillet, Godard était encore trop sage.

« Je vais vous raconter mon histoire… », Trintignant incarne à merveille ce personnage dont l’histoire est en constante réinvention. Son jeu amène la légèreté et l’ironie qui font de ce film une de ces bizarreries à voir.

Kees Bakker

Trintignant Inconnu

Lancé par Roger Vadim dans Et Dieu créa la femme…, devenu star, avec Anouk Aimée, dans Un homme et une femme de Claude Lelouch, avec qui il tournera aussi son dernier long métrage, Les Plus Belles années d’une vie, Jean-Louis Trintingnant est mort le 17 juin à Uzès, après une immense carrière.

Acteur emblématique pour beaucoup de réalisateurs et dans beaucoup de films (plus de 130 !), il était incontestablement un des plus grands. Ayant également tourné avec Valerio Zurlini, Dino Risi, Abel Gance, Jacques Doniol-Valcroze, Georges Franju, Jacques Demy, Costa-Gavras, Eric Rohmer, Bernardo Bertolucci, François Truffaut, Alain Cavalier, Ettore Scola, Krzysztof Kieslowski, Jacques Audiard, Michael Haneke – pour ne mentionner qu’eux – les hommages ont été nombreux.

Nous avons revu, pour la énième fois, Un homme et une femme, nous pensons à Et Dieu…, au Conformiste, à Amour… Mais, plutôt que reprogrammer des films connus, pour rendre hommage à Jean-Louis Trintingant, l’Institut Jean Vigo a choisi deux films majeurs, mais auxquels on ne pense peut-être pas immédiatement : un Western de cet autre fameux Sergio : Corbucci, dans lequel il brille par son silence, ainsi qu’un film d’Alain Robbe-Grillet (avec qui il tourna quatre films), pour lequel il a obtenu l’Ours d’argent du meilleur acteur. Deux films dans lesquels Trintignant montre son talent, son calme inquiétant, ses clins d’œil, son jeu sérieux et ludique… Bref, il montre qu’il était un très grand acteur.

Kees Bakker