Description de l'évènement

Mercredi 9 octobre 19h

Regards intérieurs sur la Russie

Présenté par Marina Razbezhkina

Il était une fois un merle chanteur

Otar Iosseliani, Géorgie, 1970, 1h25, DCP

Int. : Guéla Kandelaki , Irina Djandieri,  Goghi Tchkheidze, Elena Landia 

Quand je dis à mes étudiants que ce film d’Otar Iosseliani n’a pas été autorisé à la diffusion, ils sont étonnés : « Mais il n’y a rien de politique, aucune lutte contre le régime. »

« Si » je leur réponds, « le film n’a pas été autorisé à l’écran parce qu’il ne correspondait pas à la morale soviétique. Le héros, censé être un modèle positif, est en fait un paresseux. Il est trop sympathique et pourrait devenir un mauvais exemple. Quelques années avant la sortie du film, le jeune poète Joseph Brodsky avait été condamné à cinq ans de travaux forcés pour “parasitisme”. »

Si Otar Iosseliani avait été écrivain, tout le monde aurait dit qu’il avait une plume légère, comme son poète préféré, Pouchkine. Cette légèreté empêche la morale de détruire le monde fragile de ses personnages. Le fait que le scénario soit tragique – la mort d’un héros charismatique et merveilleux – n’empêche pas le spectateur de prendre plaisir à regarder le film. La mélodie intérieure du film – une simple chanson sur un bonheur accessible, pas seulement au paradis mais aussi ici, sur terre. On pourrait penser que le réalisateur, capable de capter cette mélodie pure, est né et a vécu dans un autre temps, sur une terre épargnée par le mal. Mais ce n’est pas le cas. Son père, ancien officier tsariste, a passé près de trente ans en prison en tant qu’ennemi du peuple. Otar lui-même, une fois devenu réalisateur, est resté longtemps sans travail. Heureusement, la France l’a sauvé. Ici, il a réalisé plusieurs films magnifiques – « Les Favoris de la lune », « Et la lumière fut », « La chasse aux papillons » – tout en restant fidèle à sa légèreté.